Faut-il se tourner vers le végétal ? (partie 2)

Le végétarisme et le végétalisme sont des modes de vie qui dépassent les aspects purement nutritionnels abordés dans la partie 1. Nous aurions tort de les réduire à ces simples questions de protéines et de vitamines. Ils reposent sur des postulats éthiques qui ne reconnaissent aucune légitimité, ni même nécessité, à une exploitation animale. Dans l’histoire de l’alimentation, ces régimes sont restés statistiquement anecdotiques et bien qu’on note une augmentation des personnes y adhérant depuis quelques années, ils le sont encore aujourd’hui : 0.4 % de la population Suisse adopte un régime végétalien (environ 32’000 personnes) (1), encore moins de vegan (difficile à chiffrer) et moins de la moitié des vegans (47%) militent activement pour les droits des animaux (2). Le décalage entre le traitement médiatique de ces questions et le nombre de personnes concernées nous oblige à nous questionner. Mais les médias en ayant fait une question de société, il n’est pas exagéré de dire que la morale d’aujourd’hui a ajouté un nouvel interdit à sa longue liste : manger de la viande est presque devenu un crime. Est-ce faire fausse route que de penser ainsi ? Tentative de réponse.

Être végan (dans le pire des cas végétalien), n’est plus perçu comme un choix personnel mais comme un impératif catégorique qu’on nous invite à suivre sans discussion. Par conséquent et très logiquement, le végan veut obliger l’autre à se rallier à sa position. Par la persuasion tout d’abord, en culpabilisant ceux qui continuent de manger de la viande. Par la loi et la force ensuite, s’il l’estime nécessaire (violence physique, caillassage des boucheries, incendie d’abattoirs, etc). C’est tout particulièrement les incohérences de ces postulats éthiques qui m’ont le plus intéressées dans l’étude du véganisme.

Précision nécessaire. Je n’ai aucune animosité à l’égard de ceux qui font un choix de vie végétarien, végétalien ou végan. Chacun est libre de ses choix alimentaires et de ses convictions que je respecte volontiers, tant qu’il respecte celles des autres. Mais un grand nombre de personnes se tournent vers ce mode alimentaire pour les mauvaises raisons. Le végétarisme radical reste étonnamment mal conceptualisé et conduit à des paradoxes que la quasi-totalité des végétariens ignorent. Le végétarien croit que son combat est tellement juste, qu’il n’a guère besoin de le penser mais seulement de le répandre. Ma critique portera donc essentiellement sur les végétariens éthiques et radicaux, ceux qu’on reconnaît par la suite logique décrite dans le paragraphe précédent. C’est donc à eux et à eux seuls que je ferai référence par le terme générique de végétarien. Je suis conscient des nuances (qui ont été décrites dans la partie 1) ainsi que des différences entre végan et anti-spéciste, mais c’est ici l’idéologie qui m’intéresse et que je résume, par soucis de clarté et de fluidité dans le texte, par le terme générique de végétarien.

1. Une éthique à géométrie variable

En se nourrissant uniquement de végétaux, le végétarien croit qu’il peut se nourrir sans faire souffrir ou tuer qui que ce soit. C’est malheureusement faux ! L’agriculture, (et sans commune mesure l’agriculture intensive), détruit les écosystèmes dans lesquels elle est installée et entraine la mort de millions d’espèces animales. Lombrics et insectes meurent par millions dans les sols des monocultures. En conséquence de nombreuses espèces d’oiseaux et de rongeurs disparaissent également car les écosystèmes fonctionnent de façon cyclique. Si un animal meurt de façon massive, des centaines d’autres disparaissent (3). La cause : L’agriculture intensive destinée à nourrir 8 milliard de personnes et principalement les populations urbaines, là où se regroupent 3/4 des végétariens.

Il n’y a donc pas uniquement l’animal qui a été tué pour disposer un morceau de viande dans notre assiette. Il y a tout ceux qui ont été tués dans le processus et qui sont morts de façon indirecte pour produire ce que nous mangeons. Combien de rivières détournées pour irriguer les champs, combien de prairies labourées, combien de forêts rasées, combien de tonnes de pesticides répandues sur les monocultures ? Combien d’espèces tuées directement et indirectement par l’agriculture intensive ?